« Le seigneur d’Estaing était très lié avec le seigneur de Vallon, dans la vallée de la Truyère. Celui-ci était veuf et avait un jeune fils. Contraint de partir à la guerre, ce seigneur confia son fils et le domestique de celui-ci à son ami le seigneur d’Estaing. Celui-ci avait une fille, un peu plus jeune. Les deux enfants jouèrent et grandirent ensemble, jusqu’au jour où, devenus adolescents, ils sentirent l’un pour l’autre une profonde attirance.
Or, le seigneur d’Estaing projetait de marier sa fille à un puissant seigneur du voisinage, le baron de Thénières, un homme dur et violent. La jeune fille, heureuse dans la compagnie du jeune sire de Vallon, n’éprouvait au contraire que l’aversion pour celui que son père lui destinait. Le baron de Thénières, comprenant que le coeur de la jeune fille était déjà pris, amena le seigneur d’Estaing à renvoyer, chez lui, à Vallon, le jeune compagnon de sa fille.
Les jeunes gens, en se séparant, jurèrent de se revoir. Au jour fixé, une lumière placée en haut de la grande tour indiquerait qu’il n’y avait point de danger. L’indiscrétion d’une servante mit, par l’intermédiaire de son serviteur, le baron de Thénières au courant.
Connaissant le jour et l’heure à laquelle le jeune page devait venir, ils s’adjoignirent six vauriens, que le seigneur de Thénières paya très largement, et firent par une nuit très obscure abattre l’arche principale du pont qui reliait Estaing à la rive gauche.
A l’heure dite, le jeune homme arriva par la Rouquette, sur la rive gauche, non loin d’Estaing. Dans la nuit, il ne vît pas l’abîme, qui s’ouvrait à la place du pont et il se noya dans le gouffre. Son serviteur ne le voyant pas revenir voulut aller le lendemain à sa rencontre. Il vit le pont brisé, comprit qu’il était sans doute tombé et vint alerter le seigneur d’Estaing et toute la population.
On chercha le long de la rivière le corps du jeune homme. On finit par l’apercevoir en face du chemin de Montaigut. Avec une petite barque, que l’on appelle dans le pays un nego-fouol, on réussit à ramener le corps.
Pendant ce temps-là, une brève enquête, qui ne laissait aucun doute, fit découvrir l’auteur du crime : le baron de Thénières.
A la demande de la jeune fille, le seigneur d’Estaing fit ensevelir le jeune homme au lieu où on l’avait sorti du Lot et il fit construire au-dessus de la tombe une chapelle, et à côté un logement pour un ermite dont la mission serait de prier pour le défunt et les deux familles d’Estaing et de Vallon. Cette chapelle est appelée depuis La Capelo del Douol, la chapelle du deuil. La jeune fille ne tarda pas à suivre son compagnon dans la tombe.
Le jour anniversaire de la mort des deux amants « disent les pêcheurs d’Estaing, une légère nuée semblable à un brouillard s’élève au-dessus de la grande tour du château et prend peu à peu la forme d’une femme aux longs vêtements blancs, les mains jointes élevées vers le ciel et l’on entend par trois fois le cri parfaitement distinct : Douol !… Douol !… Douol !… et tout disparaît. » (d’après Pons d’Hauterive)
Pendant longtemps, les messes de Neuvaine y furent célébrées. La Chapelle était consacrée à Saint Laurent, diacre et martyr. Le 12 juin 1731, à l’issue d’une grande cérémonie, les reliques qui étaient déposées furent ramenées à l’Eglise du Nayrac.
La Chapelle fût vendue à la famille Bousquet de Carmarans et passa par plusieurs propriétaires : Monsieur Galtier, Notaire, puis à E.D.F. qui l’a cédée à la commune du Nayrac.
Le culte n’y est plus célébré.
Belle légende pour cette chapelle en bordure de la route départementale reliant Estaing à Entraygues. Aujourd’hui grâce à la rencontre de gens passionnés et de quelques bénévoles, cette chapelle reprend vie.
Madame Francine SAMPER, une Estagnole débordant d’énergie, a retroussé ses manches pour nettoyer et embellir les alentours de la chapelle. Depuis 6 ans et après de longues heures de dur travail, de culture, de fleurissement, le résultat est surprenant. Un parterre de végétaux des plus variés (iris, millepertuis, marguerites, bleuets, primevères, petits arbustes) offre un lieu accueillant et chaleureux.
Il suffit de descendre quelques marches, plus ou moins égales, mais qui font le charme d’un escalier authentique, et là, une fois la porte poussée, on entre à l’intérieur de ce lieu rempli d’histoire et de légende.
C’est ici qu’un jour Monsieur Peter WOOD, artiste anglais et nouveau propriétaire du Paradou, découvre ce lieu et cette chapelle. Il souhaite à son tour apporter ses talents d’artiste à la rénovation de ce bâtiment.
Avec la complicité de Francine SAMPER, Peter WOOD rencontre Monsieur Robert THOMAS, Maire du Nayrac à l’époque, afin de lui demander la permission de travailler à l’intérieur et de réaliser des peintures en rapport avec la légende et la Bible.
Sur des surfaces en plâtres peintes à la peinture blanche d’émulsion,
Peter WOOD réalise plusieurs tableaux représentant le jeune seigneur et la dame ; les sept péchés capitaux ; Adam et Eve ou bien encore Saint Christophe, Saint François d’Assise, etc… . Ces fresques réalisées à base de peinture acrylique redonnent vie à la chapelle. Pour compléter son œuvre, l’artiste réalise aussi des chandeliers (en acacia et chêne de la région) ainsi que la croix, tous posés sur l’autel de la chapelle.
Depuis le 20 septembre 2008, l’autel a un nouveau tissu conçu et brodé par Madame Shuna GILES, une artiste de Nouvelle Zélande. Elle fut inspirée pour créer ce travail par Peter WOOD. Puisque Peter, a donné son temps et son talent à la chapelle, Shuna a souhaité s’associer, par amitié, à la cause en envoyant sa contribution venue de l’autre côté du monde.
site internet : http://peterwoodarts.com
Dans le Nord-Aveyron, entre Estaing et Entraygues, coule tranquillement la rivière « Le Lot ». Dominant cette gorge profonde en cet endroit, se trouve le rocher superbe de Fombillou.
Et il y a fort longtemps…
La disette sévissait en notre région. Malgré cela, dans certains villages on avait encore un petit peu de tout, et ces vivres attiraient des meutes de loups.
Pour se débarrasser de ces carnassiers indésirables, les habitants du dit village trouvèrent une astuce… !
En appât ils attachèrent un « cabrit » (chevreau) au faîte du rocher de Fombillou qui majestueusement domine le Lot.
Les cris de la bête attirèrent les loups, et la nuit venue les gens de Fombillou avec des genêts et des brandons de paille allumés les firent tomber dans le précipice, les détruisant totalement.
Lés loups dé Foubilliou
Dîn lou tins los gronds mèros
Countabou lou loup ét lo bérgéro
Mé pér iou l’omic Ginestou
In défouorro dé lo consou
Oquél histouéro mé léguét
Et otaou mé lo countét
Oui quont ol païs yabio miséros
Coumo ol jiour d’huéî sur maîssos térros
Lo nuéch les loups lo mouort hurlabou
Ol liéch lés éfons plourabou
Ol billatchi dé Foumbilliou
Dés missons loups roudabou
Lou sér digus poudio sourti
Toutés lés loups, érou aqui
Mé troubérou éno soulutiou
Obéc lou fomus roc dé Foumbilliou
Ol cap do quél pélaou dé roc
Qué doumino lou Lot din bloc
Un pouguét éstoca in cabrilliou
Tou offomat, més incaro biou
Lou sér maî lou cabrit béguéiorio
Lo bando dé loups, dél s’opprouchiorio
Et quont lo nuéîch orribét
Tout lou billatchi sourtîét
Yobio pas dé néou, ni dé plésio
Pés « Foumbillious » ét lour idéio
Hommés, fénnos obéc lo fourco
Dés paous, bostous, mourcéls dé souco
Toutés crédabou coumo dés fats
Tiniauou : pallio ginéssés inflomats
Lour colio fa oquél socriticé
In poussént lés loups bol précipicé
Ol roc autaou tout sé possét
Et lou brabé cobrit n’y pérîét
To bién qué dînpîéy sé dicht
Qué lou coprîn dél bilatchi o dricht
O lo récounéssinso dé tout Foumbilliou
Qué séguét rénoummat pés cobécous
Les loups de Fombilliou (traduction)
Dans le temps les grands-mères
Chantaient le loup et la bergère
Mais pour moi l’ami « Gineston »
En dehors de la chanson
Une belle légende me confia
Voici tel qu’il me la conta
Quand en Viadène, il y avait misère
Comme aux jours actuels sur d’autres terres
La nuit, les loups la « mort » hurlaient
Au lit, les enfants pleuraient
Au village de Fombillou étaient
Des méchants loups qui rodaient
La nuit personne ne pouvait partir
Les loups empêchaient de sortir
La solution ils la trouvèrent
A leur rocher ils pensèrent
Au sommet de cet important roc
Qui domine le Lot d’un bloc
Quelqu’un put attacher un chevreau
Tout affamé, mais bien costaud
Le soir, plus la bête bégayerait
La bande de loups s’approcherait
Quand la nuit fit apparition
Les habitants sortirent des maisons
Ce jour là sans neige ni pluie
Les « Fombillou » ayant bien réfléchi
Hommes, femmes de fourches armés
Hurlant, courant comme des dératés
Certains avec des paillons enflammés
Tous vers le roc se dirigeaient
Car là se trouvaient tous les loups
Ils tombèrent dans le Lot d’un seul coup
Au roc, ainsi tout se passa
Et le brave chevreau n’y périt pas
Comme stratégie ce fut très adroit
De plus le caprin du village eut droit
A la reconnaissance de tout Fombilliou
Qui fut renommé pour les cabécous
Légende ou histoire ? Est-ce vrai ?
Personnellement je ne le sais…
Toujours est-il que pour la Saint-Jean,
Dans ce Nayrac tous les ans,
Lorsque la nuit noire arrive,
Hommes et femmes tous s’activent ;
Ils vont parfois le feu allumer,
Avec des brandons de paille enflammés ;
Ce feu de Saint-Jean qu’au loin on voit,
Se rattache peut être à l’autrefois,
Quand on chassait les loups en force,
Avec solidarité, astuces et torches.
Raymond Rouquette (Mon pays de Viadène)